Agathe Gaillard : La rencontre avec une grande dame de la photo

J’avais rendez-vous en fin d’après-midi, juste à l’heure du thé, avec La légende des galeristes de photos à Paris.

Un rendez-vous avec cette femme à l’élégance sans pareil qui a connu les plus grands noms de la photographie humaniste. Elle les a fréquentés, accompagnés, promus, vendus, mais surtout comme elle me l’a confié, elle les a toujours écoutés, “parce que personne n’est mieux placé que les photographes pour parler de photographie”.

C’est comme cela qu’elle a créé la première galerie de photos à Paris en 1975.

Je l’attendais au café du bout de la rue de son ancienne galerie, à la devanture toute aussi rouge qu’avant, mais avec son nom transformé en “Galerie rouge” par la volonté de la nouvelle propriétaire.

Si elle a vendu la galerie avec son fonds photographique, elle n’a pas bradé pour autant son patronyme. Quand on s’appelle Agathe Gaillard, il est impossible que quelqu’un d’autre puisse exploiter ce nom. Ses souvenirs lui appartiennent, personne ne peut se les approprier.

J’attendais attablé au café du Pont Louis-Philippe, juste après avoir englouti en marchant un falafel venu tout droit d’un des derniers restaurants juifs de la rue des Rosiers. En m’asseyant dans ce lieu typiquement parisien, j’avais une sorte de pressentiment en ne la voyant pas arriver, et j’avais raison. Nous avions fixé cette date sans que je ne l’ai jamais confirmée, ce qui expliquait la raison même de son absence.

Le lendemain, à la même heure, alors que je me trouvais sur mon vélo, j’arrêtais brusquement de pédaler. Je laissais passer Agathe Gaillard qui traversait juste devant mes roues, rue du Pont Louis-Philippe, afin se rendre au café où nous avions enfin rendez-vous.

Elle me remercia chaleureusement de ce geste si rare. Je lui répondis que je ne pouvais pas en faire moins pour la femme avec qui je devais passer un moment au café d’en face. Notre rencontre venait de bien commencer. La beauté de cette situation quasi incongrue donna le ton au reste de cette fin d’après-midi.

Je passerai les raisons premières de notre rencontre ainsi que les suivantes, pour m’arrêter sur les dernières minutes de notre échange. Cela faisait trois bonnes heures que nous parlions photos, photos d’hier comme d’aujourd’hui. J’avoue qu’avec un plaisir non dissimulé je me régalais à écouter ses anecdotes qui transpiraient un vécu plus qu’évident.

Je ne sais pas pour quelle raison j’ai décidé de lui poser cette question qui est sortie toute seule, loin de mes habitudes au savoir-vivre plutôt “j’ose pas” que “je rentre dedans”. “Cela fait plusieurs heures que nous parlons photo. Vous avez vu mon travail au sein de mes différents ouvrages. Quand je rentrerai chez moi ce soir, ma famille me demandera comment s’est passé mon rendez-vous“. Je lui répondrai, “il s’est bien passé puisque nous sommes restés longtemps ensemble”. Cette réponse qui m’a toujours semblé la plus pertinente, ne satisfera pas mes interlocuteurs.

Ainsi pour la première fois j’ai demandé à une professionnelle de l’image de s’exprimer sur mes réalisations, de donner son point de vue sur les créations d’un Frèd Blanc inconnu du XXIe, elle qui a vu passer entre ses mains les plus grandes photos du XXe siècle.

Agathe Gaillard m’a dit d’une manière très directe et sans faux semblant qu’il y avait beaucoup de créativité dans mon travail, qu’elle sentait que je ne cherchais pas à me fondre dans le machin à la mode, très déco et sans saveur, que je n’avais pas peur de suivre mon chemin à l’originalité assumée dans une époque où il n’y en a pas, une originalité présente dans la multiplicité d’approches que je déploie, dans la diversité de mes expressions artistiques que je confronte, qu’il fallait que je continue dans cette direction parce que c’est ce genre de démarches qui fait bouger les choses, que je mérite d’être exposé dans un grand espace, comme le 104 par exemple, pour tout montrer, que si elle avait encore sa galerie, elle m’exposerait. Avant de conclure que c’est stimulant de voir un tel travail, que ça fait du bien.

Ouuuaaouuuuuu. Je n’ai plus rien dit, je ne savais pas quoi répondre. Je n’avais d’ailleurs rien à répondre.

J’ai chevauché ce petit nuage planant en forme de vélo avec, posés négligemment sur mon porte bagage, quelques noms de professionnels incontournables de la photo à contacter de sa part. Puis je me suis délecté dans le regard de celle qui venait de porter un avis plus qu’encourageant sur mes productions, sans concession comme elle me l’a fait comprendre, sur ce que certains pourraient appeler un bout d’œuvre, moi qui ai toujours l’impression de ne présenter que des expérimentations.

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A propos Frèd Blanc

Tout a commencé dans les années 80 / 90 par Penninghen (l'ESAG) suivi d'un tour du monde. 30 ans après je suis devenu graphiste, photographe, poète & designer d’images (mentales & visibles) chez byfredblanc, anciennement edo. Quand je ne traîne pas dans un musée aux côtés de ma famille (Astrid Bouygues, Monsieur Elia et Mademoiselle d'Esther), un carnet de croquis sous le bras, où que je ne glisse pas sur les pistes de ski d’Avoriaz appareil au point, je pédale dans Paris entre deux rendez-vous, soit en construisant des analogies pour une marque en devenir, soit en rédigeant un poème. Projets : Entre 1996 & 2016 : conseil & accompagnement en communication (labo pharmaceutiques, joaillerie, hôtellerie, services, industrie...) 1997 : Identité de Ladurée pour son ouverture aux Champs Élysées. 2002 : Agenda photographique international pour Sanofi Synthé-labo. 2010 : Sculpture monumentale en hommage à Jean Vuarnet 2012 : Coup de cœur de la 49e Bourse du Talent Reportage / Photographie.com 2014 : Création de l’évènement “Sunday jazz loft”, concert en appartement, aux côtés de Francesco Bearzatti. Juin 2016 : Sélection aux Promenades Photographiques de Vendôme : Présentation du parcours "Et si le jazz est la vie autour d'une centaine de photographies et de la projection de 12 pœms-poèmes et une centaine de photo Octobre 2016 : Performance musicale et sonore lors du 13e Sunday jazz loft. Mise en musique de mes 12 poèmes de "Et si le jazz est la vie" par Francesco Bearzatti (sax tenor clarinette), Camille Bertault (voix), Federico Casagerande (guitare) et Thierry Eliez (piano et voix), en parallèle d'une projection aléatoire de mes 12 pœms poème par Matthieu Desport (vidéaste) Novembre 2016 : Création des Éditions de Ouf Bibliographie : 2006 : Ouvrage photographique “Téléphérique pour l'enfance”. Éditions Jean-Michel Place. Photographies, dessins, poèmes & maquette. 2010 : recueil de poésie “Des mots mis en baraques à sons”. Éditions Jean-Michel Place. Poèmes, dessins, photographies & mise en page. 2016 : "Et si le jazz est la vie" Éditions de Ouf. Poèmes, dessins, photographies & mise en page.
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