Un Sunday jazz loft tout en folies furieuses et dingueries créatives.

Je l’attendais depuis longtemps ce Sunday jazz loft, ce premier SJL thématique que j’imaginais différent des précédents, et je n’ai pas été déçu.

Je peux vous l’avouer maintenant que le concert est derrière nous, mes attentes étaient bien en deçà de ce que nous avons vécu hier.

J’ai adoré me faire surprendre à répétition.

C’était un objet lunaire, sans la moindre attache terrestre, dans un lieu inconnu où le mental a laissé toute sa place à notre écoute émotionnelle. Il fallait juste se laisser faire pour voyager. Et quand c’était le cas… mais vous le savez puisque vous y étiez – en tout cas certains d’entres vous.

Partir sur la thématique de la folie pour cette nouvelle version de SJL – quand on en est à la 23e session et que la formule précédente ne s’est même pas essoufflée – était un pari osé qui pouvait facilement glisser, soit dans du n’importe quoi, soit dans du sur-conceptuel.

Mais ce ne fut pas le cas. Ça ne pouvait pas être le cas avec trois énergumènes comme Francesco Bearzatti, Thierry Eliez et Médéric Collignon.

Trois écriveurs du présent, inscrits dans l’instant.

Chacun d’eux, perché d’une manière débridée sur une branche aux vibrations fragiles, nous a projetés dans l’illusion de dérapages et de glissements incontrôlés, grâce à sa capacité à accueillir de l’encore inconnu, pour eux comme pour nous.

Ce tout en commun imprévisible nous a ouvert un champ expérimental inimaginable en défrichant le terrain de la folie musicale et sonore : bruits et sons du quotidien, tapotis, cris et autres formes vocales étaient parties intégrantes de ce concert de fous. Ces fous que rien n’arrête jamais de relancer en boucle d’autres délires, libres de toute contrainte sociale.

Entouré d’instruments improbables, très jouets d’enfants en plastique coloré, Médéric est parti à plusieurs reprises, avec certains d’entre eux, dans des expérimentations qui semblaient d’autant plus sans queue ni tête qu’elles étaient maîtrisées dans des formes ouvertes à l’inattendu.

Surpris par certaines de ces propositions incongrues, Francesco n’arrivait pas toujours à jouer tellement il riait, comme nous d’ailleurs.

Imperturbable, mais de dos – il ne voyait pas la scène – Thierry laissait ses mains plonger dans un délire du maintenant et accompagner, suivre, précéder pianistiquement ce que nous recevions visuellement par les grimaces sonores de Médéric et les étonnements de Francesco.

Puis ils redescendaient tous les trois dans du plus conventionnel, si on peut le définir ainsi. Du standard de jazz plus mélodique, qui ne le restait d’ailleurs jamais très longtemps pour nous projeter indubitablement dans une jouissance mélomaniaque, tellement le niveau était haut en folie.

Pour changer d’air, Médéric a restitué d’une manière étrange mes poèmes sur des fous perdus dans leur chez eux souvent opaque. Il s’est mis à tailler dedans, à les gratter vocalement, à attraper du mot comme il venait. Dans ces découpages incongrus, il paraît que l’on entendait encore ma voix, m’a-t-on dit. Étrange. J’ai surtout découvert une forme nouvelle, déstructurée et réinventée par l’organe vocal collignonesque.

 

Mais je vous rassure, Francesco n’a pas fait que rire pendant ce SJL. Il est parti plus d’une fois à bout de souffle dans des échanges d’air respirant ce que lui donnaient ses deux compagnons de folie instantanée.

Compagnons que l’on a retrouvés à ses côtés, en rang d’oignons, lors d’un instant furtif, pour une conversation tout en scat.

Puis le détonant instrumental a refait surface jusqu’au bout du concert, pour finir dans du fou rire de musicos, au moment même où mon tour d’interpréter mes deux poèmes en fou incarné était venu à maturité.

Leurs rires de connivence ne cessaient pas. L’attention du public restait focalisée sur le trio, dans le coin au piano.

Seul au centre, il fallait que je prenne le dessus. Sur l’instant j’étais totalement déstabilisé. J’étais en train de prendre ma plus belle leçon de comédien en herbe, en live.

Je suis rentré dans leur jeu en me l’appropriant. C’était la seule chose à faire pour récupérer l’écoute générale et devenir fou, dans une montée d’émotions où le texte me suivait, me précédait, m’accompagnait avant qu’Esther, ma fille – en personnage miroir de ma folie – ne me jette au sol, en mots, puis en un geste brusque, me ramenant à la réalité dans un échange de regards vrais.

Cette réalité où Elia, mon fils, est sorti de derrière la caméra pour vêtir sa tenue de sketch-man, la voix douce, nous rappelant à quel point les Sunday jazz loft sont depuis le début une histoire de fous dont nous sommes tous les protagonistes. En nous faisant passer de la folie furieuse des musiciens à une folie contenue, la sienne, il a su déclencher une approbation de fous, accompagnée de rires tendres. Il paraît qu’il est bon – mon fou de fils – d’après certains d’entre vous, les fous des Sunday jazz loft.

Fous, on le sait maintenant.

Que va donc nous raconter Francesco lors du prochain SJL ? Moi je le sais. Vous, vous le découvrirez le 15 décembre prochain.

 

A propos Frèd Blanc

Tout a commencé dans les années 80 / 90 par Penninghen (l'ESAG) suivi d'un tour du monde. 30 ans après je suis devenu graphiste, photographe, poète & designer d’images (mentales & visibles) chez byfredblanc, anciennement edo. Quand je ne traîne pas dans un musée aux côtés de ma famille (Astrid Bouygues, Monsieur Elia et Mademoiselle d'Esther), un carnet de croquis sous le bras, où que je ne glisse pas sur les pistes de ski d’Avoriaz appareil au point, je pédale dans Paris entre deux rendez-vous, soit en construisant des analogies pour une marque en devenir, soit en rédigeant un poème. Projets : Entre 1996 & 2016 : conseil & accompagnement en communication (labo pharmaceutiques, joaillerie, hôtellerie, services, industrie...) 1997 : Identité de Ladurée pour son ouverture aux Champs Élysées. 2002 : Agenda photographique international pour Sanofi Synthé-labo. 2010 : Sculpture monumentale en hommage à Jean Vuarnet 2012 : Coup de cœur de la 49e Bourse du Talent Reportage / Photographie.com 2014 : Création de l’évènement “Sunday jazz loft”, concert en appartement, aux côtés de Francesco Bearzatti. Juin 2016 : Sélection aux Promenades Photographiques de Vendôme : Présentation du parcours "Et si le jazz est la vie autour d'une centaine de photographies et de la projection de 12 pœms-poèmes et une centaine de photo Octobre 2016 : Performance musicale et sonore lors du 13e Sunday jazz loft. Mise en musique de mes 12 poèmes de "Et si le jazz est la vie" par Francesco Bearzatti (sax tenor clarinette), Camille Bertault (voix), Federico Casagerande (guitare) et Thierry Eliez (piano et voix), en parallèle d'une projection aléatoire de mes 12 pœms poème par Matthieu Desport (vidéaste) Novembre 2016 : Création des Éditions de Ouf Bibliographie : 2006 : Ouvrage photographique “Téléphérique pour l'enfance”. Éditions Jean-Michel Place. Photographies, dessins, poèmes & maquette. 2010 : recueil de poésie “Des mots mis en baraques à sons”. Éditions Jean-Michel Place. Poèmes, dessins, photographies & mise en page. 2016 : "Et si le jazz est la vie" Éditions de Ouf. Poèmes, dessins, photographies & mise en page.
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