Il y a un peu plus d’un an Simon Lelouch, un ami de longue date, m’appelle pour me proposer un projet : photographier les bénévoles des différentes associations d’une ville près de Paris, Ris-Orangis. Je ne la connais pas encore, mais le sujet m’excite déjà.
Entrer dans la vie des gens, comprendre ce qui engendre l’envie de partager ou ce qui déclenche une passion, et plein d’autres choses encore que je découvrirai tout au long de ce parcours humain, c’est ce qui m’a poussé à réaliser des milliers d’images de ces personnes toujours prêtes à agir pour les autres, leur bien-être, voire leur mieux-être encore.
Me voilà projeté dans un des cœurs battants de Ris, comme ils disent là-bas, quelque part sur la ligne D du RER. J’y passe facilement une journée par mois, entre salles de fêtes, centres de jeunes, stades sportifs, structures extérieures, sans oublier les écoles ou les jardins familiaux.
Le premier reportage devait couvrir la Journée des Associations. Je passe des heures à arpenter des stands et à capter les moments forts de démonstrations sportives mais aussi les temps de récupérations et de pauses. Je recherche de belles expressions, des rires sur les visages de toutes ces personnes qui ne me connaissent pas, qui ne comprennent pas toujours ce que je fais là.
Tout se passe au mieux, je finis exténué mais heureux d’avoir échangé avec tous grâce à mon outil, le boîtier photographique. Ce premier reportage est bien reçu par la ville. Le plus insolite est que personne n’a jamais su que j’avais réalisé cette production avec une seule main, l’omoplate cassée et le bras gauche en bandoulière. Je l’avais d’ailleurs oublié moi-même.
Puis les reportages ce sont succédés. J’ai alors vécu au rythme des moments fort de Ris-Orangis, cette ville à laquelle je me suis attaché petit à petit, bien qu’elle soit à deux heures de transport de chez moi, d’où je pars toujours bien en avance pour ne pas rater le début d’un discours de Stéphane Raffalli, ce maire qui se sur-investit dans sa ville, les premières notes d’un concert spécial sixties ou l’entrée en piste d’une troupe invitée, celle du cirque d’Adrienne.
Systématiquement en avance, quand il n’y a pas un changement d’itinéraire pour cause d’inondation sur la ligne, de colis suspect ou de grève, j’attends “l’instant décisif“ (expression d’Henri Cartier-Bresson), je guette le “temps faible” (idée de Raymond Depardon) qui pourra être fixé en un centième de seconde et symboliser une action entreprise par un bénévole. Et quand ce n’est pas un bénévole, c’est un adhérent d’une association, et des associations il y en a plus de deux cents dans la ville. De quoi raconter bien des histoires différentes.
J’ai réalisé durant cette année certains reportages plus rudes que d’autres. Quand il a fallu par exemple couvrir l’inauguration d’un centre d’handicapés moteurs et mentaux, la tâche ne fut pas simple. Prendre des photos de ces hommes et de ces femmes qui vivent dans leur tête, et dans une tête qui ne fonctionne pas comme la nôtre ; qui subissent un corps qui ne répond pas à des stimuli reconnaissables par nos critères de jugement. Cette expérience m’a grandement déstabilisé.
Je me suis retrouvé dans une position de voyeur, mais pas seulement, je me suis senti totalement démuni face à ces personnes, vidé de mon énergie débordante, incapable de réagir face à leurs réactions. Et pendant ce temps des bénévoles donnaient de la joie et du bonheur en flux continu. Mais où vont-ils chercher toute cette force de vie ? Où trouvent-ils cette puissance positive qu’ils transmettent dans des éclats de rires ? Des larmes me montaient aux yeux. Je suis sorti à plusieurs reprises pour me ressourcer un peu plus loin, dans le silence du jardin.
Le premier samedi de janvier 2017, ce fut la soirée des vœux du maire pour sa ville. Au milieu d’activités festives, une projection de quelques centaines d’images des vingt premiers reportages a tourné en continu toute la soirée, sur quatre écrans géants, non loin de l’estrade centrale. Ces mêmes images que l’on retrouve sur le site risenimages.fr, créé depuis le début de cette aventure pour partager ces moments hors du commun avec les Rissois.
Pour la première fois j’ai découvert les réactions des personnes que je prends en photo depuis plus de douze mois. Personnages que je continuerai inlassablement à fixer, encore et encore, sur ma pellicule numérique, sur ma carte mémoire de cette ville qui a toujours quelque chose à exposer devant mon objectif. Ces images de leur vie que je m’approprie, avant de la leur rendre un peu transformée par mon regard.
Après les quelques mots du maire sur mon travail de reportage au long cours, certains Rissois sont venus vers moi en m’appelant par mon nom, afin de me donner avec générosité leur image. Alors j’ai fait leur portrait dans cette bonne humeur festive, avant le prochain reportage.
Maintenant il me reste à numéroter, légender, choisir et tirer les photos qui iront sur le site internet…
Très bien exécuté Fred ! J’ai apprécié !
Beaux reportages Fred !
Bruno (ancien du 91 et ayant beaucoup fréquenté Le Plan)
Belle expérience photographique.
J’apprécie le travail en noir et blanc, les différentes positions de cadrages qui font ressortir un peu l’âme des personnes, très beau travail sur nos “humains rissois”.
lol