Nous voilà déjà chacun dans notre demain, là où le 8e Sunday jazz loft fait partie d’hier. De notre passé. De ce passé ensemble un moment hors du temps, hors de ce temps habituel de notre vie quotidienne.
La tête me tourne et je me demande si tout cela était bien vrai.
Aujourd’hui tout a repris sa place avec ses habitudes, celles d’avant le dernier Sunday jazz loft qui a maintenant rejoint nos souvenirs, que nous partagerons lors du prochain, quand nous nous reverrons, quand nous nous rappellerons que c’était l’un des meilleurs.
Peut-être même le meilleur, en tous les cas le plus récent.
Hier passé était incroyable. Francesco Bearzatti s’est envolé avec Benjamin Moussay, rien ne les a retenus au sol, pas même eux.
Ils ont démarré lentement en s’auto-écoutant tellement fort et si doucement en même temps, que nous nous sommes arrêtés de faire peu importe quoi d’autre que leur offrir toute la place et encore plus. Hier passé est repassé dans ma tête. C’était incroyable.
Du pur jus Bearzatti.
La musique s’est déployée crescendo pour nous emporter tout là-haut, entre les oreilles du piano qui laissaient s’épanouir les notes en sax, et celles de la clarinette qui se faisait plaisir à regarder celles du piano s’envoler.
Puis Giovanni Mirabassi, le premier invité de Francesco, a offert au piano ce temps suspendu de ses doigts agiles, de ses yeux grand ouverts à cette musique de partages.
Les voix de Camille Bertault et Thierry Péala lui ont succédé pour nous ouvrir d’autres horizons, jamais assez, toujours plus vastes.
Et voilà déjà que c’était fini mon gars. Alors que tu étais presque parti, le silence a repris sa place, les chapeaux ont tourné et j’ai lu mon poème, celui du concert précédent, celui du programme. Vous avez ri, vous avez ri encore de “son sax entre ses mains”, et moi
je planais, à moitié pendu par Francesco, à moitié découpé par vous, à moitié ailleurs, en apesanteur.
La soirée a continué entre fromages forts et verres de vin, à écouter des airs folkloriques italiens, avant de finir dans un after-after avec les happy fews, avec une impro à voix, très jazz, d’un invité, comédien de son état, Patrick Borg.
Un pur délire, Patrick s’est glissé dans une histoire improbable, puis une deuxième tout aussi pas possible, sur les notes à la sauce du duo Francesco-Benjamin, sous le regard enfantin d’Esther qui n’avait pas non plus sa langue dans la poche. Et quand ils se sont tous mis à jouer de leurs cordes vocales, rien ne pouvait plus nous étonner. Je filmais compulsivement pour garder une trace. Je viens de voir l’enregistrement, quelle éclatade…